La bataille du détroit
d'Otrante ( 15 mai 1917 )
Le barrage d'Otrante ( cliquez p.
agrandir )
Le détroit d'Otrante, entre
Corfou et Brindisi, qui est le passage de l'adriatique vers
la méditerranée, était large d'environ
100 km et "fermé" durant la guerre par le
fameux "barrage d'Otrante". En réalité
ce dernier, conçu par les Britanniques avec des moyens
réduits, ne fut guère efficace, notamment contre
les submersibles. Il comprenait une cinquantaine de chalutiers
armés dotés de TSF qui devaient avertir les
bases proches, dépêchant sur place des bâtiments
pour la plupart ancrés à Brindisi, à
"portée de fusil". L'Autriche-Hongrie pour
sa part, n'eut de cesse d'effectuer des raids sur ce "barrage".
Le peu de chalutiers disponibles sur un si grand secteur rendait
la surveillance difficile, laissant de vastes zones découvertes.
La défense s'appuyait aussi sur des champs de mines
près des côtes, la plupart mouillées à
20 mètres de fond, les chalutiers mouillant de grands
filets en acier censés les avertir du passage des submersibles.
On estime cependant que par mauvais temps et de nuit toute
la flotte Austro-Hongroise aurait pu passer tranquillement
au travers et menacer gravement les convois, notamment vers
les Dardanelles. Heureusement pour les alliés cette
situation n'eut jamais lieu, et seuls des submersibles passèrent.
( Seul l'U6 fut capturé ).
En fait, les rares unités
Austro-Hongroises vraiment actives furent des escadrons comprenant
en général un croiseur léger de la classe
Admiral
Spaun et plusieurs destroyers ou torpilleurs de haute
mer. Plus de 30 sorties furent effectuées en 4 ans
de guerre ( voir "opérations en adriatique"
), la plupart sans résultats. Elles ne dégénérèrent
que très rarement, à une exception près:
La bataille du 15 mai 1917. Le 14, la flotille Austro-Hongroise
commandée par le capitaine Miklos Horty, futur amiral
en chef de la flotte, appareillait de Cattaro pour un énième
raid sur le barrage, afin de s'en prendre aux lignes de surveillance.
Cette flottille se composait cette fois des trois croiseurs
légers de la classe Spaun, repeints et déguisés
en destroyers. Ils avaient d'ailleurs une silhouette attirant
la méprise avec les Tatrà,
et comptaient jouer dessus. Ils étaient accompagnés
par deux destroyers modernes ( Czepel
et Balaton
) et trois U-Bootes.
Le 17, en pleine nuit, l'escadron
débusquait un transport de munitions escorté
par un destroyer Italien, qui furent tous deux envoyés
par le fond. Ils s'en prirent ensuite comme prévu pendant
deux heures, de 3h30 à 5h30, aux chalutiers de suveillance,
en en coulant pas moins de 14, tandis que 12 autres étaient
gravement endommagés. L'alerte fut donnée et
l'escadre combinée Anglo-Italo-Française à
Brindisi, sous le commandement en chef de l'amiral Italien
Alfredo Acton, appareilla en urgence pour intercepter les
navires de Horty avant leur repli. La rencontre eut lieu sous
l'oeil vigilant des hydravions de surveillance alliés
du secteur. En tête de l'escadre alliée, se rouvaient
les croiseurs Dartmouth
et Bristol,
et quatre destroyers Italiens menés par l'Aquila.
Vers 7h45, ces derniers arrivaient à apercevoir les
navires Austro-Hongrois qui mettaient cap au nord, et l'interception
qui aurait pu mener à la destruction de l'escadre de
Horty fut un échec du fait du manque de coordination
des navires alliés. Seul l'Aquila fut gravement
touché par les tirs, le reste des navires s'échappant.
Une poursuite s'engagea. Cette dernière, à pleine
vitesse était trop intense pour deux destroyers qui
firent volte-face victimes de pannes machines, de même
que le Bristol, et finalement seul le Dartmouth
et deux destroyers continuèrent la chasse.
Le Novara fut touché, sa
passerelle dévastée et les officiers dont Horty
morts ou blessés. Le Saida, également touché,
intervint pour le prendre en remorque, et le Dartmouth aurait
pu les couler tous deux si un "miracle " ne se produisit:
Le veilleur Italien détecta en même temps que
des fumées à l'horizon venant de Cattaro le
pavillon le signalant. Craignant le renfort d'unités
lourdes, le Dartmouth et son escorte cessèrent
la poursuite et firent volte-face. Les croiseurs endommagés
rejoignirent Cattaro peu après. Le Dartmouth
fut torpillé au retour par l'UC25 ( du type mouilleur
de mines ) et y survécut, tandis que le destroyer Français
Boutefeu sauta sur l'une des mines déposées
à l'entrée de Brindisi par ce même submersible.
Horty, bien que gravement blessé,
retira de cette action un prestige tel que lorsque la mutinerie
de cattaro éclata et qu'un changement de tête
s'imposa, il fut promu au grade de contre-amiral et de commandant
en chef de la flotte jusqu'à l'armistice. Quand au
responsable de la défense d'Otrante, il fut blâmé
pour son innefficacité, mais personne ne pouvait prétendre
pouvoir renforcer ce barrage sans les moyens adéquats,
qui n'arrivèrent que fin 1917 avec l'entrée
en guerre des USA et des renforts Australiens avec l'apport
de 35 destroyers et 52 chalutiers. Le bilan de cette affaire
était mitigé. Le Dartmouth et l'Aquila étaient
hors-service pour des mois en cale sèche, un transport,
un destroyer Italien, furent coulés et la plupart des
chalutiers de surveillance avaient étés mis
hors de combat; tandis que le Helgoland n'avait été
que légèrement atteint, les deux autres plus
gravement. Aucune nouvelle sortie ne fut planifiée
dans l'immédiat.