La Marine Turque (1914-1918)
Certainement le parent pauvre
de l'armée Turque, la marine avait étée
jadis la plus puissante de méditerranée Orientale
durant plusieurs siècles. En 1870, elle dominait encore
les Russes en mer noire, et était incontournable dans
l'océan indien et la mer rouge, sans parler de la méditerranée.
Mais depuis que l'empire avait essuyé des défaites
sanctionnées par des pertes de territoires considérables,
la marine avait vu son budget s'amenuiser à grande
vitesse. Il n'y eut pratiquement plus aucune commande à
l'étranger de navires neufs. Les défaites subies
face à la flotte Russe n'y furent pas étrangères,
et la marine avait perdu son prestige et la confiance des
dirigeants de l'empire. Si elle avait joué un rôle
capital lors de l'éviction du Sultan Abdul Aziz au
profit de Abdul Hamid II, en 1878, elle était démobiliée
et démoralisée; Sans entretien, ses unités
nombreuses et puissantes étaient laissées à
l'abandon et pourrirent de rouille à quai.
A partir de 1884, quelques commandes donnèrent
le change, mais n'altéraient pas le rythme des mises
hors service de bâtiments puissants. En 1890, un nouveau
plan ambitieux faisait état de commandes de cuirassés
du type Hoche à la France et la reconstruction de cuirassés
anciens, mais aucune commande de croiseur ou de destroyer
ne fut poursuivie. Au début du siècle, deux
nouveaux croiseurs et quelques destroyers furent construits
et acquis, mais furent condamnés également à
l'inaction totale tandis que les vieux cuirassés étaient
modernisés et convertis en bâtiments côtiers.
Le coup d'état des "jeunes Turcs"
allait en 1909 faire changer d'attitude la Turquie vis-à-vis
de sa flotte. Ce mouvement nationaliste reança en effet
des ambitions de puissance navale, et annonça d'emblée
un plan naval de 6 ans comprenant 6 cuirassés, 12 destroyers,
12 torpilleurs et 6 submersibles. La réalisation de
ce plan tardit de telle sorte que lorsque la guerre éclata
en 1911 avec l'Italie, la flotte Turque était complètement
impréparée. Afin de parer à l'urgence,
le gouvernement acheta 2 cuirassés Allemands et 4 destroyers,
ainsi que des navires civils rapides pour reconversion en
canonnières. Cette décision était à
mettre au crédit des deux contre-amiraux Britanniques
William et Gamble qui avaient étés nommés
de leur commission navale à Istambul à la tête
de la flotte en 1910. Néammoins, le manque d'audace
de la flotte fit que peu de sorties furent entreprises jusqu'en
1912. Cette flotte constituée des deux cuirassés,
deux croiseurs, et 5 destroyers sortit des Dardanelles pour
jeter l'ancre à Beyrouth, mais les bâtiments
présents dans 6 autres ports de la côte dont
Izmir furent taillés en pièces par la marine
Italienne. Ses forces ne purent pas empêcher lors de
la guerre des Balkans la mainmise des Grecs sur presque toutes
les îles de la mer égée.
Au début de cette guerre contre les Grecs,
dont l'un des objectifs était de reprendre la Crète,
la Turquie racheta à la Grande-Bretagne le cuirassé
Rio de Janeiro, qui aurait dû s'appeler Sultan Osman
I. On sait que ce dernier fut à son achêvement
intégré à la Royal Navy. D'autres commandes
furent passés à l'Allemagne et à la France,
mais aucune définitive. On étudia aussi la possibilité
que de grands chantiers Britanniques reprennent en main par
une location trentenaire plusieurs ports turcs dont Izmir,
mais la survenance de la guerre mit fin à ce projet.
En 1914, l'armée Turque était encadrée
très efficacement par des officiers Allemands ( une
mission militaire s'était d'ailleurs installée
depuis la fin de 1913, aux ordres du général
Von Sanders ). La marine, en partie équipée
à l'Allemande, fut également influencée
par la politique de Berlin. Lorsqu'en août les navires
Turcs commandés furent saisis par les Britanniques,
l'opinion publique mais surtout le gouvernement nationaliste
déclara la guerre à la triple entente.
Un miracle se produisit alors: En méditerranée
se trouvait l'escadre Allemande composée du croiseur
de bataille Goeben assisté du croiseur Breslau. Cette
escadre commandé par le contre-amiral Wilhelm Souchon
se trouvait à Alexandrie, qu'il dût quitter en
catastrophe, et les forces navales Françaises et Britanniques
se préparaient à le traquer et à l'anéanir.
Contre toute attente dans sa position désespérée,
Souchon choisit de rallier directement les Dardanelles et
de se réfugier à Constantinople, qu'il atteint
le 11 août. A ce moment les deux navires étaient
réfugiés dans un port neutre, et le gouvernement
Turc, avec l'assentiment de Berlin, acheta les deux navires,
qui du coup renforçaient singulièrement la flotte.
Dès le 1er Novembre, la flotte Turque réorganisée
autour de son nouveau bâtiment-amiral effectua des bombardements
de grands ports Russes de la mer noire.
Par la suite, la flotte n'effectua jamais de
sortie à l'ouest, et les forts, mines, filets et batteries
côtières des Dardanelles allaient infliger plus
de dégâts aux forces Franco-Britanniques lors
de leur tentative de débarquement qu'aucune escadre
en méditerranée. Les sorties des navires Turco-Allemands
furent peu fréquentes mais efficaces et contribuèrent
à désorganiser les convois de ravitaillement
Russes. Par ailleurs, des flotilles en Mésopotamie,
sur l'Euphrate et le Tigre furent constituer pour lutter contre
les Britanniques grâce à des bateaux Allemands
venus par l'intermédiaire de la Bulgarie. En 1918 toutefois,
la situation militaire Turque s'était réglée
sur terre, au sud, et l'amistice de Mudros tomba à
point nommé. Le sort du Goeben aurait été
normalement d'être joint aux navires de la Hochseeflotte
envoyés en captivité à scapa Flow, mais
sous le nouveau nom de Yavuz Sultan Selim et le commandement
de l'amiral Arir Pasha, sembla un temps échapper à
ce sort et être définitivement intégré
à la flotte Turque, internée à Izmir
sous contrôle Britannique. Par le traité de Sèvres
en 1920, celle-ci fut singulièrement amputée
par des démolitions forcées, réduite
à 7 canonnières, et 6 torpilleurs dont l'armement
était précisément limité. Le Yavuz,
comme le reste des bâtiments lourds devait en principe
être donné à la Grande-Bretagne ou au
Japon.
Finalement, le coup de force Nationaliste mené
en 1919 par Mustafa Kemal ( Ataturk ) en Anatolie chassa du
trône le Sultan Mohammed VI en 1922, après une
révolution et une guerre civile, et les deux canonnières
des forces de Kemal de réfugièrent au sein de
la flotte de la mer noire alors aux mains des "Rouges"
pour éviter la capture. Finalement les Forces Turques
battirent les Grecs et leur victoire fut reconnue par le traité
de Lausanne le 24 juillet 1923. Cet accord signait aussi la
libération de la flotte Turque internée à
Izmir.
Forces disponibles en 1914: