Célèbre au sein de la Royal Navy pour avoir
été le premier porte-avions d'escadre opérationnel,
le Furious était à l'origine un croiseur
de bataille léger, venant d'une spécification
de 1915, la même que pour les Glorious et Courageous.
Mais à la différence de ces premiers, ils
devait avoir deux pièces de 457 mm, un calibre record,
mais qui constituait une évolution logique qui avait
dépassé le stade théorique dans les
bureaux d'étude Japonais, Allemands, et Américains
en 1916. pour gagner du temps et permettre au Furious
d'être délivré dans les délais,
on reprit intégralement les plans des Courageous
auxquels on apporta quelques correctifs: L'adaptation de
pièces d'un tel calibre encore expérimental
était hasardeux sur un bâtiment aussi légèrement
construit, et nécéssita la pose de deux pièces
seulement, une pour chaque tourelle à peine agrandie,
mais spécialement adaptée pour tenir sur le
socle standard des tourelles de 381 mm, de manière
à pouvoir y revenir rapidement à moindres
frais. La pièce elle-même était usinée
exactement comme celle de 381 mm, avec la même volée,
le même système de chargement simplement élargi.
Ces tourelles se révélèrent même
plus spacieuses que celles ayant deux affûts.
La seconde différence fut l'abandon des pièces
de 102 mm en affûts triples pour un armement secondaire
plus efficace en adoptant les 140 mm déjà
expérimentés sur les croiseurs de la classe
Birkenhead. Ils se révélaient bien
plus efficaces que les 102 mm par leur puissance de feu,
et avaient un temps de rechargement largement inférieur
à celui des pièces de 152 mm, tout en bénéficiant
de leur position haute avantageuse. Toutes ces pièces
étaient en affûts simples, sous masques. La
seconde différence était que pour pallier
la trop légère construction de la coque, très
critiquée, cette dernière était élargie
de plus de deux mètres, notamment par l'emploi de
Bulges. On escomptait ainsi réduire l'effet de roulis
entraîné par une bordée latérale
avec ces formidables pièces, améliorer la
stabilité et la résistance de la coque, qui
restait cependant encore dramatiquement sous-protégée.
On mit ce bâtiment en chantier chez Armstrong le 8
juin 1915, et il fut lancé en août 1916 soit
trois mois après la bataille du Jutland. A son achêvement,
les croiseurs de bataille souffraient d'un discrédit
certain, et le projet initial d'employer ces bâtiments
légers dans les opérations de bombardement
de la côte pour les débarquements en Baltique
était mort-né.
Lorsqu'il fut presque achevé en mars 1917, on lui
avait ajouté pas moins de quatre bancs triples et
deux bancs doubles de tubes lance-torpilles fixes et latéraux,
qui s'ajoutaient encore au deux tubes sous-marins. Mais
avant qu'il effectua ses essais, l'amirauté qui désirait
augmenter les capacités aériennes de la flotte
décida de le convertir en porte-avions hybride, en
adaptant un hangar avec une piste d'envol au-dessus sur
toute la partie avant, de la passerelle à la proue.
De ce fait, les nouveaux plans étaient approuvés
fin mars, et les travaux s'achevèrent prestement
en juillet. Le 7, il avait entamé sa campagne d'essais
et était entré en service dans la Grand Fleet.
Mais en Octobre, l'amirauté spécifia une nouvelle
modification à la lumières des premiers essais
de décollage et d'appontage. Autant le décollage
était simple, effectué depuis des mois sur
de simples plate-formes, autant l'appontage représentait
un problème considérable, notamment du fait
de la prise au vent de ces appareils très légers
et du roulis du bâtiment hôte. En août,
le Commandant Dunning parvint à se poser sur le pont
avant, mais périt lors de sa seconde tentative. De
toute évidence l'espace nécéssaire
devait être repensé. C'est ainsi qu'une nouvelle
transformation plus radicale fut envisagée, qui fut
finalisée en novembre.
A sa sortie, le Furious avait perdu sa tourelle arrière,
ses quatre bancs triples de tubes lance-torpilles, ses pièces
axiales de 140 mm, et gagné un grand hangar et des
équipements spécifiques courant de la poupe,
surélevé, jusqu' à la cheminée,
le passage entre la piste d'appontage et le pont avant se
faisant par des passerelles latérales. Pendant des
mois, le Furious servit à titre expérimental.
Il était le premier bâtiment de cette importance
à recevoir ces aménagements. Pour éviter
que les appareils - des Sopwith Pup du RNAS ( Royal naval
air service )- ne s'écrasent sur la cheminée
en bout de piste, on monta un grand filet de récupération
derrière, maintenu par des câbles montés
sur des systèmes hydrauliques. La rudesse ce ce système
d'arrêt rustique prouva sa pertinence, tant que l'on
avait pas encore envisagé le montage des brins d'arrêt
de pont. Le Furious nouvelle manière fut accepté
à Rosyth en mars 1918 et entama une campagne d'essais,
sous la direction du contre-amiral Phillimore. On utilisait
alors des Sopwith Pup équipé de skis don la
friction permettait de les arrêter plus vite, mais
les appontages se révélèrent délicats
du fait de la gêne occasionnée par la fumée
de la cheminée axiale. Sur 13 tentatives, seules
3 furent couronées de succés. Par contre on
effectua avec succés des lancement d'appareils plus
gros, des Sopwith Camel et Strutter. Ces derniers apportaient
à l'aéronavale un rayon d'action supérieur
et une capacité d'attaque grâce à leur
capacité de bombardiers légers.
En mai-juin, le problème d'appontage n'était
pas encore entièrement résolu, mais les appareils
revenaient aux trains à roues, renforcés.
Le Furious effectuait des missions d'aclairage de la flotte.
Au cours de l'une d'elle en mer du nord, un premier combat
aéronavale prit place lorsque des Camel du Furious
affrontèrent des hydravions Allemands, abattus finalment
par sa DCA. Plusieurs missions prirent place juisqu'en juillet
1918, lors de la première attaque aéronavale
réussie, en l'occurence contre les hangars de Zeppelins
de Tondern dans le Schleswig-Holstein, que la presse salua
unanimement: Londres subissait en effet à cette époque
un "blitz" aérien qu'infligeait les Zeppelins
et d'autres bombardiers lourds à sa capitale. En
1919 il fut envoyé en Baltique pour assister les
Blancs et la Royal Navy contre les Bolchéviques,
puis evint à Rosyth en novembre pour d'autres modifications
et un passage en cale sèche. On décida de
le reconstruie enore totalement, à la lumière
des opérations, et des pans furent préparés
en ce sens.
Son double hangar, son pont d'envol, son arrangement de
machines et sa passerelle furent modifiées ou supprimées
lors d'une reconstruction qui intervint entre 1922 et 1925,
lui donnant son visage définitif. Il ré-entra
donc en service en août 1925, en se voyant doté
d'un pont d'envol moins long que la coque, avec un seul
hangar et deux ascenceurs cruciformes, prévus au
départ pour des appareils dont les ailes ne se pliaient
pas. Il était critiqué pour son faible emport
de carburant pour avions, et sa faible protection, bien
qu'il reçut des ballasts antitorpilles. Il n'embarquait
que 36 appareils, et n'avait plus de passerelle ou de cheminée
axiales sinon une cabine téléscopique en bout
de piste. En 1939, on le conduisit à Devonport pour
de nouveaux travaux, il se vit doté d'une vraie passerelle
et d'une DCA plus importante et moderne. Durant le second
conflit mondial, le Furious participa à de
nombreux combats, notamment en méditerranée,
comme à la seconde bataille de la Grande Syrte en
1943. Mais ce service intensif et ininterrompu et son relatif
manque d'entretien fatigua sa structure et en septembre
1944, il fut retiré de la première ligne.
Il resta à occuper des rôles secondaires, comme
le transport d'aviation ou l'écolage, avant de devenir
navire-dépôt et de terminer sa carrière
à la démolition en 1948. ( Voir navis2GM ).
Caractéristiques d'origine ( Mars 1917 ):