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Le torpillage du Lusitania - 7 mai 1915.

La position du Lusitania lors de son naufrage
Le RMS Lusitania à son lancement ( Img TDP )

Après le célébrissime Titanic, coulé en temps de paix, le naufrage du Lusitania reste une des plus grandes tragédies maritime de l'histoire dont les conséquences ont étées déterminantes comme facteur déclencheur de l'entrée en guerre des USA aux côtés de l'entente. Dix ans auparavant, c'est la belle époque. Deux grandes compagnies transtalantiques s'affrontent à coup d'effets de prestige et de luxe, de démesure technique, et de millions de livres Sterling, sous le regard incrédule de la presse. Il s'agit des deux géants du transport de passagers, la Cunard et la White Star Line. Si cette dernière reste fameuse pour avoir mis en service en 1911-12 trois immenses paquebots, le Britannic, l'Olympic, et le Titanic, dont l'histoire ne se conte plus, sa grande rivale historique l'avait éclipsée dans les journeaux par le triomphe de son nouveau challenger, le Mauretania, dès 1907. Ce dernier sortit trois mois après le Lusitania, lui ravissant le titre de plus grand navire du monde, et y ajoutant le titre du paquebot le plus rapide du monde, en reprenant le mythique Ruban bleu et en le conservant pensant 20 ans. La Cunard désirant conserver trois navires sur sa ligne de l'Atlantique, comme la White Star line, lança plus tard l'Aquitania.

En 1914, les trois géants ne furent pas réquisitionnés car jugés top grands, et conservés dans leur rôle initial sur la ligne transatlantique. En revanche, plus tard, le Mauretania devint un transport de troupes. Par mesure d'économie et de sécurité, le navire vit sa fréquence passer d'un voyage par semaine à un par mois et deux chaudières fermées, sa vitesse tombant à 21 noeuds. A partir du 15 février 1915, le Kaiser autorisait la guerre sous-marine sans restrictions: Ses U-Bootes pourraient à présent rôder le long des îles Anglaises, et jusqu'au large des côtes d'Irlande en Atlantique Nord. Les nouvaux modèles de submersibles océaniques construits le permettaient. Le 18 février, cette décision entrait en vigueur et désormais tous les navires neutres susceptibles de ravitailler la grande-Bretagne seraient torpillés sans avertissement. Cependant les commandants Allemands avaient deux restrictions, concernant certains navires neutres, et concernant les navires ne transportant pas d'armes ou de munitions.

Du 17 au 24 février 1915, partant de Liverpool, le Lusitania effectuait sa 101eme traversée vers New York, qui fut fêtée comme il se devait. Il resta une semaine à quai avant de repartir. Ce faisant, des passagers à la double nationalité ( Allemande et Américaine ) qui devaient embarquer consultèrent l'ambassade Allemande qui leur déconseilla d'effectuer le voyage. On fit d'ailleurs passer un note en Anglais expliquant que prendre place à bord ne pouvait se faire qu'à ses "risque et périls":

"NOTICE: TRAVELLERS intending to embark on the Atlantic voyage are reminded that a state of war exists between Germany and her allies and Great Britain and her allies; that the zone of war includes the waters adjacent to the British Isles; that, in accordance with formal notice given by the Imperial German Government, vessels flying the flag of Great Britain, or any of her allies, are liable to destruction in those waters and that travelers sailing in the war zone on the ships of Great Britain or her allies do so at their own risk.


IMPERIAL GERMAN EMBASSY,
Washington, D.C. April 22, 1915.
"

La presse eut vent de cette note et l'agitation commença à provoquer des annulations chez nombre de passagers. Confiant cependant, le capitaine William "Bower Bill" Turner, continuait à affirmer que son navire était trop rapide pour les U-Bootes et "plus sûr qu'un trolley de New York". A midi, le navire larguait les amarres et récupérait des passagers et membres d'équipage du Cameronia. Trois espions Allemands furent découverts peu après le départ et envoyés à fond de cale. 1257 passagers avaient pris place à bord, dont - comme il était de coutûme sur les grands transatlantiques - des célébrités et hommes d'affaires du temps comme le millionnaire Alfred G. Vanderbilt, le généalogiste Whitington, l'ingénieur Frederick Stark Pearson, le pianiste Charles H. Knight, les acteurs de théâtre Julius Miles Forman et Charles Klein, l'impresario Charles Frohman, l'écrivain Ian Holbourn, l'architecte T. Pope, un richissime collectionneur d'art...

Pendant sa traversée de retour, loin du confort doré des salons, les bureaux de l'amirauté reçurent une dépêche en provenance des stations de la côte qui interceptèrent un message de TSF de l'U20 du commandant Walter Schwieger qui opérait à l'ouest de l'Irlande et se dirigeait vers le sud. Le 5 et 6 mai, ce dernier coulait trois navires aux environs du Fastnet, le point final de la ligne que suivait le Lusitania. Par conséquent, le 6, la Royal Navy communiquait un avertissement à tous les navires présents, qu'un U-Boote rôdait sur la côte sud-ouest de l'Irlande. Le Lusitania reçut le message deux fois et le commandant Turner décida de procéder à des mesures de sécurité: Fermeture des portes étanches, déverrouillage des canots sur les bossoirs pour les mettre à l'eau plus rapidement, extinction partielle des feux, et doublement des veilleurs.

Le 7 mai à 11 heures du matin, il captait un nouveau message de l'amirauté, et décida alors de se rapprocher de la côte plutôt que de rester en pleine mer, où il espérait être plus en sécurité. De son côté le commandant Schwieger arrivait à cours de mazout, mais il lui restait encore trois torpilles. Il décida finalement de rentrer, et naviguait à pleine vitesse en surface. Le temps était clair. Soudain, vers 13h00, un des veilleurs signala une fumée à l'horizon, et Schwieger ordonna le branlebas. Le Lusitania se trouvait alors à 70 km du village d'Old Head of Kinsale, lorsqu'il croisa la route du submersible. Schwieger n'en revint pas de sa chance de pouvoir croiser ainsi le paquebot, qui arrivait à l'ouest, face à lui. Il pouvait fort bien l'intercepter, mais pas le poursuivre en effet car il aurait été vite distancé. Vers 14h10, arrivé à bonne distance, il plonge pour éviter d'être aperçu, et ordonne au tube 1 de faire feu. La torpille file droit vers le flanc, à l'avant de l'énorme masse noire...

A la suite de l'ouverture provoquée immédiatement à bâbord dans la coque, une seconde explosion déchira celle-ci sur une grande longueur. Les témoignages parlèrent de deux torpilles, mais les rapports officiels et le nombre de torpilles restantes à bord plaidèrent le contraire. Quoiqu'il en soit, le géant offrait une plaie béante au niveau de la proue, engloutissant à pleine vitesse des dizaines de tonnes d'eau de mer. Turner comprit immédiatement de quoi il retournait et lança un SOS tandis que des mesures étaient prises pour faire embarquer les passagers à bord des chaloupes. Mais sa gîte augmenta à grande vitesse, et notamment son assiette, car rapidement le pont avant, au niveau de la proue joua un effet de "soc de charrue", s'enfonçant toujours d'avantage tandis que le navire plongeait, accentuant son remplissage. Sa technologie de compartiments datait d'avant le Titanic, et il ne pouvait se prétendre insubmersible. Dès lors, son naufrage fut bien plus rapide ( 18 minutes ). Turner décida cependant de tenter de faire route sur la côte pour échouer son géant sur les plages. Mais le paquebot était désormais trop lourdement chargé, et ne répondait plus. Il ordonna de réduire la vitesse, mais rapidement les soutiers començèrent à évacuer les salles inondées.

Sur les ponts, Turner et son équipage ne purent juguler la panique qui s'était emparée des passagers, car la mise à l'eau des canots, pourtant cette fois en nombre suffisants, fut un cauchemar: Le Lusitania avait été assemblé avec des rivets saillants, et avec la gîte importante, la plupart des canots descendus, lourdement chargés, raclaient la coque et par conséquent, arrivaient à l'eau avec des fuites provoquées par ces rivets. Le maniement des bossoirs se révéla difficile pour les membres d'équipage, dont beaucoup de novices issus du Cameronia, ( un étrange clien d'oeil à James cameron? ), et par fébrilité et manque de coordination, se retournèrent, soit en descendant, soit à l'eau, d'autre encore tombaient brutalement et s'écrasaient sur des passagers, se brisaient... . Au final, sur 48 canots, seuls 6 parvinrent à rester à flot, chargés de femmes et d'enfants. La fin du géant fut terrible: Coulant par l'avant, sa proue se tordit, l'arrière se souleva, puis la coque se brisa par l'avant. L'une des cheminées explosa, et tomba sur les rescapés nageant, suivis des trois autres. Enfin, il se retourna et sombra ventre à l'air définitivement à 14h28, à seulement 8 milles de la côte d'Irlande.

Au total il y eut 1198 victimes, dont 128 américains. Le choc fut considérable, mais ne fut que le premier facteur déclencheur qui conduisit les Etats-Unis dans la guerre. La question de savoir si le Lusitania transportait armes et munitions ( les Anglais nièrent farouchement ce fait, et qualifiaient Schwieger de criminel de guerre ) reste controversée. Certains pensent que des munitions estampillées "fromage" étaient bel et bien à bord, en contrebande, et auraient provoqué la seconde explosion lors de l'impact torpille. Il reste que le prof. Ballard a visité l'épave lors d'une campagne et n'a rien trouvé de probant. Pour lui, les "munitions" étaient stockées trop loin de l'impact, mais c'était les résidus de poussière de charbon du compartiment touché qui auraient détonné. Devant le scandale provoqué par cette affaire, le Kaiser ordonna une "trève" pour les grands paquebots, jusqu'en septembre. Une médaille satirique fut fondue à Munich commémorant le naufrage du paquebot et la propagande s'empara de l'affaire, renforçant la haine des Britanniques vis à vis des "barbares", et cultivant le ressentiment profond des Américains, en dépit de leurs concitoyens attentistes dont une bonne partie était d'origine Allemande.


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