La Bataille de la Baie de Manille ( 1er
mai 1898 ).
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Carte d'époque
présentant les opérations de la bataille
de Manille ( domaine public )
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La Bataille de Manille à été
l'attaque-"surprise" par la marine Américaine
de la flotte Espagnole du pacifique mouillée en baie
de Manille, au Philippines. La destruction complète
de cette flotte allait avoir pour conséquence d'empêcher
tous renforts à Cuba et de faire tomber l'immense
archipel dans le giron des USA. Ce fut également
la chute des colonies de l'Empire Hispanique du Pacifique,
depuis 1565. Cette victoire fut d'autant plus éclatante
pour l'US Navy, que sa réalisation était risquée,
qu'elle ne déplora aucune victime mais quelques blessés
légers, et l'impression qu'elle fit, conduisit, entre
autres, les Japonais à appliquer les mêmes
recettes à Port Arthur contre les Russes quelques
7 ans plus tard. Ce mode d'attaque-"surprise"
( Les Espagnols s'y attendaient plus ou moins ) et préventive
allait inaugurer un concept naval inédit dans les
opérations. Ce succés fêté sans
mélange allait largement faire pour surnommer la
guerre "the splendid little war".
Tout commence avec les plans étudiés
par l'amirauté en cas de confrontation avec l'Espagne,
quelques années auparavant. C'est alors le Commodore
Georges Dewey qui est nommé à la tête
de l'escadre Américaine du Pacifique, basée
à Hong Kong, sous l'insistance personnelle de l'assistant
au secrétaire naval à la maison-Blanche, Théodore
Roosevelt. Cette escadre asiatique est assez maigre en terme
de forces de choc, surtout comparé à la flotte
Espagnole renforcée par les batteries côtières,
et comporte le croiseur USS Olympia, le croiseur USS Boston,
la canonnière USS Petrel et le très vieux
vapeur à roues à aubes USS Monocacy. De plus,
les connaissances concernant les forces Espagnoles du secteur
étaient maigres, tout juste se basait-on sur l'hypothèse
que le gros de la flotte était ancré à
Manille, ce qui fut confirmé plus tard par le consul
Américain sur place, Oscar. F. Williams. Le lieutenant
Upham ( de I'USS Olympia ) était également
en civil et en secret dans la capitale des Philippines pour
tenter de glaner des informations précises sur les
navires en rade et de passage. Enfin Dewey avait aussi comme
sources un homme d'affaires qui y venait périodiquement
et l'informait discrêtement. Enfin, le ravitaillement
en munitions ( mais aussi en charbon de bonne qualité
) était un vrai problème. Les navires de l'escadre
n'avaient à quelques jours de la bataille pas encore
reçu le quart leur stock d'obus. Les navires ravitailleurs
étaient difficiles à trouver et à affrêter,
beaucoup de compagnies et d'équipages refusaient
de prendre le risque...
Le croiseur USS Baltimore, mis en cale
sèche, sa coque nettoyée et repeinte en gris
foncé en 48 heures seulement, arriva cependant en
renfort la veille de l'appareillage de la flotte et distribua
ses munitions pour compléter les stocks ( vides à
40% ), en compagnie du croiseur USS Raleigh et d'un patrouilleur
des Douanes, le Mac Culloch. Plus tard encore, au départ
de l'escadre, la canonnière Concord se joignit au
groupe. Quelques vapeurs furent également rassemblés
à des fins de ravitaillements de dernière
minute. Dès la déclaration de guerre, l'escadre
charbonnait après maintes difficultés. De
son côté le contre-amiral Don patricio Montojo
y Pasaron, dont la flotte comprenait les croiseurs Don Antonio
de Ulloa, Don Juan de Austria, Reina Cristina, Castilla,
Isla de Cuba, Isla de Luzon, et la canonnière Marques
del Duero, était basée dans la baie de manille,
et se déployait en face de la baie de Subic, dont
les défenses avaient étées renforcées.
En dernière minute, les pièces de batterie
du vieux Don Antonio et du General Lezo furent déposées
et placées en fortifications côtières,
tout comme les canons du croiseur Velasco. Le Castilla était
également en si mauvais état que des pièces
de 150 mm furent débarquées mais laissées,
peu avant l'attaque, sur la plage au lieu d'êtres
en position. L'entrée de baie de Subic était
minée, de même que celle de la rade de manille,
et des vapeurs coulés en travers.
Mais si Subic était d'un point
de vue tactique un excellent choix, aucune fortification
ne s'y trouvait alors et il y avait un risque que les batteries
ne soient pas installées à temps. Les eaux
profondes du secteur, en outre, permettait dans le pire
des cas aux navires de Montojo qui couleraient de ne pas
êtres renflouables et donc de ne pas servir ensuite
au sein de l'US Navy. Le 28 avril, il apprit le départ
de l'escadre Américaine de Dewey. En urgence, on
tenta d'installer quelques pièces, mais on lui assura
que la défense ne serait pas prête dans les
temps. De plus il reçut un message de l'un des forts
de Subic l'informant que Dewey y envoyait des unités
en reconnaissance.
De ce fait il choisit à ce moment
de revenir sous la protection des canons de Manille et d'embosser
ses navires en face de la pointe fortifiée Sangley
et de la batterie d'Ulloa, devant Cavite. Le fonds étaient
hauts et les navires devaient affleurer une fois coulés,
capables de continuer à tirer mais à contrario
aussi facilement renflouables. Le croiseur Castilla, en
partie désarmé, fut en outre protégé
par deux vieilles coques utilitaires remplies de sable.
D'autres préparatifs étaient en cours lorsque
la flotte Américaine se présenta à
l'entrée de la baie. On entendait depuis le pont
et la ville, le grondement lointain des forts...
Le 30 avril, la flotte arrive à
Luçon. Dewey envoie le Boston et le Concord en reconnaissance
à Subic, et le Baltimore, qui les suivait au-devant
de la flotte, reçut un rapport érronné
faisant état de duels d'artillerie, vite rectifiés.
Il y avait la certitude que la flotte Espagnole ne se trouvait
pas à Subic. Dewey se retourna devant son chef d'état-major
et déclara, "maintenant nous les tenons!".
On prépara l'escadre en cas d'incendie en jetant
par-dessus bord tout ce qui était fait de bois, sauf
sur le navire portant la marque de l'Amiral, l'Olympia.
On jeta également des tonnes de sable sur les ponts,
et on protégea certaines parties sensibles avec des
toiles épaisses imbibées de vinaigre, comme
on le faisait depuis toujours. La flotte se dirigea vers
l'entrée de la baie, protégée par des
îles et îlots, formant deux entrées plus
ou moins larges: Boca Chica et Boca Grande. Cette dernière
était dangereuse en raison de ses nombreux récifs
à fleur d'eau, bien que les manoeuvres y soient plus
aisées, et marquée par les forts de l'ile
de Frale et l'île Caballo, et l'autre était
moins manoeuvrable et plus lourdement défendue: C'est
l'île de Corregidor, ceinturée de forteresses,
qui en marquait l'entrée. Dewey fit finalement passer
son escadre par Boca Grande, à 23 heures, tous feux
éteints, sauf la veilleuse de poupe qui permettaient
à la ligne de bataille de se suivre.
La ligne, passant entre Caballo au nord
et El Fraile au sud, comprenait en tête l'Olympia,
suivi des vapeurs Nanshan, Zafiro, le Mc Culloch, le Petrel,
le Raleigh, le Concord et le Boston. Le mauvais charbon
du Mc Culloch fit que des flammes fort peu discrètes
qui surgissaient de sa haute cheminée furent aperçus
par les veilleurs du fort d'El Fraile, qui ouvrirent le
feu. La première salve tomba entre le Raleigh et
le Petrel. Toute la ligne répliqua, et réduisit
au silence la batterie, sans pour autant qu'elle paraisse
touchée. Cependant le poste de TSF du fort câbla
son alerte à 2 heures du matin, à l'amiral
Montojo, déjà averti par le grondement au
lointain, mal perçu derrière les hauteurs
de Cavite. Ce dernier fit sonner le rassemblement et les
équipage se dépéchèrent de mettre
à l'abri, ou de jeter par-dessus bord tout ce qui
était source d'éclats pendant la bataille,
démontant les vergues, descendant les canots, plaçant
çà et là des sacs de sable.
La ligne de bataille de Dewey remonta
tranquillement au milieu de la baie, et à 4 heures,
chez les espagnols, le branlebas était sonné.
Les hommes étaient aux pièces, aux croiseurs
comme aux forts de la pointe de Cavite, les batteries de
Canaco et de Sangley. La flotte Espagnole se trouvait en
ligne de défense étagée, devant la
ville de Cavite, le Velasco derrière la ville, la
ligne de bataille s'appuyant à l'est sur le fort
de Sangley. Le Zafiro, le Nanshan et le Mc Culloch, les
deux premiers non armés, furent finalement envoyés
en retrait dans la baie, en observateurs, tandis que la
ligne menée par l'Olympia arriva devant Manille,
n'y trouvant que des vapeurs innoffensifs, et vira de bord
en mettant le cap au sud-est, vers Cavite. L'escadre marchait
très lentement, à 3 noeuds, Dewey espérant
que ses navires ne soient pas repérés. Cependant,
les veilleurs du Don Juan de Austria aperçurent à
4h45 le feu des cheminées américaines et donnèrent
l'alerte. La ligne Américaine fut alors, à
5 heures du matin, prise à partie par les batteries
lourdes des forts de Manille, au moment même ou l'horizon
començait à rougeoyer. Deux croiseurs répondirent
"pour la forme", des ordres formels ayant étés
passés pour réserver l'usage des munitions
contre les navires seulement.
Montojo, voyant le duel d'artillerie
devant Manille, décida de permettre à ses
navires de pouvoir appareiller en urgence et fit sauter
quelques mines qui bloquaient sa manoeuvre par son croiseur-amiral,
le Reina Cristina. Dewey, à 5h15 heures, alors que
son escadre approchait, vit les lueurs des canons du fort
de Canacao ( 1 pièce de 120 mm ) et de la pointe
Sangley ( 2 canons de 150 mm ), suivis bientôt par
ceux des croiseurs Espagnols. Ce n'est que 35 minutes plus
tard qu'il ordonna de répliquer lorsque tout le monde
serait prêt. Les deux canons de 203 mm de la tourelle
avant de l'Olympia, arrivant en pointe, tonnèrent
alors, suivi par les autres navires de son escadre. En ne
présentant aux Espagnols que leur proue, les navires
de l'escadre ne couraient pas un grand risque. Mais bientôt
l'Olympia commença à virer cap à l'est
pour présenter le gros de ses pièces de flanc.
Toute la ligne vira en présentant ses flancs aux
navires Espagnols, ouvrant le feu à une distance
dérisoire ( 400 mètres ).
Le premier, le Reina Cristina fut mis
à mal par les grosses pièces américaines,
encaissant quelques ipacts avec un début d'incendie
et la mise hors de combat de son artillerie principale.
Dewey amorça alors un mouvement tournant, sa célèbre
"spirale", à marche réduite ( 6-8
noeuds, env. 10-12 Km/h ), afin de concentrer précisément
son feu, remontant vers le nord, puis revenant de nouveau
par l'est. Il restait suffisamment loin cependant pour éviter
les hauts fonds de la baie de Canacao.
A 7h30, il apprit soudainement que les réserves de
munitions pour chacune des pièces secondaires du
bord s'épuisaient et que ses canons ( ceux de l'Olympia
), n'avaient que quinze coups à tirer. La situation
risquait de se retourner très vite. Il décida
alors, bien que les hommes soient toujours prêts à
en découdre, de réapprovisionner ses pièces
et de se retirer pour permettre aux hommes de prendre un
petit-déjeuner, toujours à portée des
canons Espagnols, ce qui fut plus tard noté dans
les journaux comme une preuve supplémentaire de l'extraordinaire
nonchalance des Américains...
Mais en vérité le rapport
des stocks avait été mal interprêté,
car en fait seulement quinze obus avaient étés
tirés par les canonniers depuis tout ce temps, ces
derniers prenant plus de temps de visée qu'à
l'exercice!... Mais le résultat semblait à
la hauteur car beaucoup de coups tirés allaient au
but ( 2% , ce qui pour l'époque était un très
bon résultat...). L'ordre donné par Dewey
en tout cas fut mal reçu par l'équipage, en
particulier les canonniers qui abasourdis, devaient fournir
un rapport détaillé des pertes en hommes et
des munitions restantes. Des hommes des machines montaient
eux-mêmes sur le pont vérifier les dégâts
sur les navires Espagnols... La confusion régnait
quelque peu à la passerelle de l'Olympia, qui au
milieu de la fumée des tirs crut voir une attaque
de deux torpilleurs Espagnols, rapidement mis hors de combat
par les pièces légères à tir
rapide du croiseur. Il s'avéra plus tard en fait
qu'il s'agissait de deux petites embarcations civiles qui
se trouvaient simplement au mauvais moment au mauvais endroit...
Les Espagnols ne restaient cependant
pas les bras croisés. Ne se contentant pas de répliquer
fiévreusement, ils tentèrent une attaque à
l'ancienne mode, lorsque le Don Juan de Austria, puis le
Reina Cristina commencèrent chacun leur tour à
manoeuvrer pour éperonner les navires Américains.
Le barrage de feu les maintint à distance. Le Cristina,
déjà privé de sa direction de tir,
fut encore malmené par plusieurs coups au but dont
l'un pénétra dans son "hôpital"
et l'autre dans sa soute a munitions arrière, qui
sans exploser, fut rapidement en feu et noyée par
les pompes. Mais le feu gagna rapidement, et bientôt,
avec seulement une poignée d'hommes aux canons, la
moitié de son équipage à terre et la
plupart des officiers tués ou bléssés,
Montojo décida de saborder son navire. A bord d'une
yole, l'amiral joignit rapidement le croiseur Isla de Cuba
pour y transférer sa marque. Le Don Antonio de Ulloa
ne tarda pas à couler également, mais en eaux
peu profondes, de sorte que son équipage resta à
bord, et les autres gravement endommagés. Presque
aucun tir Espagnol n'avait porté. Le Castilla, enfin,
ne tarda pas à le suivre et fut par contre évacué
et sabordé. Montojo ordonna aux navires restants
d'appareiller en direction de la baie de Bacoor pour y poursuivre
le combat, et de s'y saborder avant reddition, en hautes
eaux.
La flotte américaine de son côté
avait encaissé plusieurs impacts, presque sans dommages,
et sans victimes. Le seul coup au but qui fut mémorable
fut celui du Baltimore, dont l'obus entra par le franc-bord,
ricocha sur le pont, traversa un rouf, rebondit à
l'intérieur du bouclier d'une pièce de 152
mm du bord opposé, ricocha une seconde fois sur le
pont et vint finir sa course dans une manche à air,
sans exploser... Bilan: 8 blessés légers,
du fait d'étincelles et d'éclats de bois.
Plus de peur que de mal. A 11h 16, le cessez-le feu devenait
une évidence tant l'escadre Espagnole semblait avoir
étée totalement mise hors de combat. Il y
eut ensuite un duel d'artillerie de 10 minutes entre le
Baltimore et les forts de Canacao et de Sangley, qui les
fit taire. Pourtant les veilleurs Américains prévinrent
que l'équipage du Don Antonio de Ulloa, pourtant
à demi immergé, se servait des derniers canons
fonctionnels. Ce n'était pas la réalité,
mais une pluie d'obus tomba bientôt sur ce qui n'était
plus qu'une épave, et malgré cela les derniers
hommes d'équipages à bord y restèrent
pour l'honneur, montrant le drapeau sang et or, et les canonniers
Américains eux-mêmes impressionnés par
le courage des Espagnols cessèrent le feu.
La canonnière Petrel fut ensuite
diligentée pour entrer dans la rade, achever les
unités Espagnoles encore valides et faire son rapport.
Arrivée devant la ville de Cavite, elle essuya des
tis venant de ses 6 pièces de 152 mm, et les fit
taire rapidement. A midi, l'affaire était faite.
Tous les navires Espagnols étaient définitivement
hors de combat. Montojo nota sur son rapport 127 morts et
214 blessés. Les batteries lourdes de Manille, pourtant
en mesure de couler les navires Américains, se tinrent
coîtes par peur des représailles. Les deux
seuls décès Américains étaient
dûs, pour l'ingénieur en chef Randall
du Mc Culloch, à une attaque cardiaque au moment
du passage de Boca Grande, et le capitaine Charles Gridley,
déjà malade, et qui dirigeait le tir de l'Olympia
depuis le blockhaus confiné, véritable four
sous le soleil implacable de la région, souffrit
de la chaleur au point qu'il en décéda un
mois plus tard devant Kobe, de retour au pays. Plus tard,
les Américains s'empareront des Isla de Cuba et Isla
de Luzon, les réparèrent, et les remirent
en service dans l'US Navy comme canonnières sous
leurs noms d'origine. En 1912, l'Isla de Cuba fut d'ailleurs
revendu au Vénézuela qui le conserva en service
jusqu'à la fin des années 40... Quand à
l'Olympia, il à été conservé
et se visite actuellement à Independance seaport
Museum, Philadelphie.
Le soir, au soleil couchant, l'USS Olympia
vint tranquillement s'embosser devant le front de mer de
Manille, abondamment pavoisé,et son orchestre au
grand complet et en uniforme de parade, s'aligna sur sa
plage arrière et entama une série de morceaux
du répertoire Espagnol en honneur du vaincu de la
journée, Montojo. Les Manilais, héberlués,
venaient écouter ces airs sur les quais, pendant
que résonnaient venant de Cavite les explosions continues
des derniers stocks de munitions des épaves se consumant
encore...
Epilogue:
Si l'escadre Espagnole était hors de combat, Dewey
ne contrôlait pas la ville, qui n'était pas,
contrairement à Cuba, la proie des insurgés.
L'escadre Américaine ne disposait même pas
d'une compagnie de marines capable de rallier la villa du
gouverneur... Dewey prit donc la décision, une fois
la nouvelle de sa victoire câblée, de mettre
en place le blocus maritime du port. On lui avait promis
des troupes rapidement. En ville, plusieurs rumeurs insistantes
parlaient d'une alliance en Europe entre l'Allemagne et
l'Espagne, en mémoire des Habsburg... Certains annonçaient
même l'imminence d'une déclaration de guerre,
et un rapport affirmait qu'une armée de 10 000 Allemands
en provenance de Tsing Tao avait débarqué
à Subic...
Cependant les mouvements d'indépendance
Philippins passèrent à l'action, et des révolutionnaires
sous la houlette d'un Cubain métis, Vicente Catalan,
se mutinèrent au sein du vapeur Compania de Filipinas,
le 5 juillet 1898. Les officiers Espagnols furent éxécutés,
et le navire rallia le port de Manille, où quelques
autres vapeurs de faible tonnage aux équipages acquis
à la cause les attendaient. Promu "amiral"
de la "Mosquito fleet" arborant le pavillon de
la république Philippine, Catalan ordonna de peindre
de fausses barbettes sur la coque et de placer sur le pont
principal des tuyaux de cuivre peints en noir qui devaient
figurer des canons.
Ainsi maquillé en "croiseur",
le transport de Tabac Filipinas rallia la baie de Subic
en vue d'obtenir la reddition de la garnison du fort, sous
la menace de ses "canons". Cependant la garnison
Espagnole refusa, et Catalan décida de mettre à
l'eau des chaloupes avec une compagnie d'infanterie pour
en terminer. C'est à ce moment que des matelots du
croiseur improvisé découvrirent avec stupeur
le croiseur Allemand Irène. Ce dernier dressa à
son mât un signal de reconnaissance et une sommation.
Le vapeur était considéré par l'Allemand
comme un "pirate", la république Philippine
étant encore très loin d'être une réalité
officielle.
La valse diplomatique avait lieu en Europe,
et chaque nation avait diligenté des navires de guerre,
uniquement souvent pour "montrer le drapeau".
Mais dans le cas Allemand, et les Philippins le savaient,
cela risquait de dégénérer. Le Filipinas
n'était pas de taille et s'inclina, hissant le drapeau
blanc. Informé de la situation, Dewey envoya le Concord
et le Raleigh pour s'interposer et exiger à leur
tour la reddition Espagnole. L'Irene, voyant les navires
Américains arriver, alla sagement mouiller de l'autre
côté d'Isla Granda, tandis qu'après
un tir de sommation bien réel, le commandant Coghlan,
du raleigh, vit avec satisfaction la garnison agiter à
son tour le drapeau blanc. Ces derniers, rassurés
par l'espoir de se rendre à des troupes régulières,
quittèrent le fort en bon ordre et rejoignirent le
Raleigh. Coghlan avait cependant reçu l'ordre de
confier les prisonniers à Catalan, ce dernier ayant
été sommé de les remettre sans heurts
au gouveneur de manille, tout en conservant leurs armes.
Ainsi s'achevait la présence
militaire Espagnole aux Philippines. Ces dernières
acquirent leur "indépendance" à
l'issue du traité de paris signé le 10 décembre
1898, mais en réalité le premier président
élu, Emilio Aguinaldo, était vu comme une
marionnette de la maison blanche par la majorité
des anciens révolutionnaires, qui reprirent les armes.
Sous la forte présence militaire Américaine,
armée et marine, une vaste suite d'opération
de contre-guérilla fut montée avec la bénédiction
du président Philippin, la "guerre de Boro".
La situation était d'autant moins simple que les
insurgents avaient repris le contrôle des anciens
forts Espagnols. Le 23 septembre 1899, une petite escadre
comprenant les Charleston, Concord, et Monterey, ainsi que
la canonnière ex-Espagnole Zafiro, maniée
par des équipages "loyalistes", rallièrent
les rivages de la pointe Kalakhan, où une batterie
aux mains des insurgés menaçait le secteur.
Après une volée des grosses pièces
de 305 mm du USS Monterey ( un monitor ), l'unique canon
répliqua pour la forme, et une compagnie Américaine
débarqua et acheva le travail. Ce ne fut qu'un incident
parmi bien d'autres. Plus tard, les troupes Américaines
durent aussi affronter la révolte des indigènes
Moros. Leur présence se fit aussi importante que
celle des Espagnols jadis, mais sous une nouvelle forme,
et les anciennes bases Espagnoles furent développées
et considérablemet renforcées et fortifiées
au long des années 20-30. En 1941, le général
McArthur dirigeait les forces Américaines des Philippines,
et jugeait les abords de Manille ( par jungle ou par mer
), imprenables. On était en décembre 1941,
mais ceci est une autre histoire...