Le Léontophoros (Léontophore), propriété de Lysimaque, Roi de Thrace, offert à Ptolémée II. Il s'agissait probablement de la plus grande monorème jamais construite. Particulièrement étroite et malgré tout ayant huit rameurs par banc, ce qui en faisait une "triple" octère au standard de l'époque (100 avirons), elle devait être très rapide, mais fut vaincue par l'Isthmia d'Antigone Gonatas.
L'Isthmia, aux couleurs de la Macédoine dont il fut l'ambassadeur, était fort différent. Plus corpulent (20 mètres de large mais seulement 70 de long), il était légèrement moins rapide bien qu'ayant tout de même 2300 rameurs sur deux rangs (rangées de 64 avirons), mais bien plus maniable et stable, plus puissant et dévastateur en éperonnage.
Ces deux illustrations décrivent deux des Léviathans de cette époque. Incarnant deux philosophies différentes, elles n'en étaient pas moins remarquables dans leur parfaite incarnation d'un genre qui ne devait pas survivre à l'ère classique. C'était le règne de navires qu'aucune gravure, ni même aucun reste probant, n'est venu attester hormis des suppositions d'après des récits concordants de nombreux auteurs antiques. Partant des familières trières Athéniennes, aujourd'hui reconstituées et dont les techniques de nage nous sont connues, on fut obligé d'admettre l'existence de navires à 4, 5 et jusqu'à 40 niveaux de rames superposées, ce qui semblait absurde, sinon à recourir au procédé déjà ancien, car pratiqué par les pirates et peuples de la mer, misant avec leurs Hemioliae (et Liburnes) sur une grande maniabilité précisément en multipliant le nombre de rameurs par banc. A partir de là, et sans arriver à des navires aux proportions délirantes, il devenait possible d'entrouvrir le voile pesant sur cette ancienne énigme de l'archéologie marine. Une "16" par exemple, pouvait fort bien être une simple trière alignant 7, 6 et 5 rameurs par banc.
Au vu de la difficulté à gérer déjà trois niveaux de rames maniées par un seul homme (testé au cours d'essais de Coates et Morrisson), qu'en était-il de navires alignant jusqu'à -s'il faut en croire la fameuse "40" de Ptolémée Philopator- 10 rameurs par banc? La seule considération du point de levier est un casse-tête pour bon mathématicien. Deux certitudes cependant: Un tel aviron devait être si long qu'il devait aussi être massif (ce qui est attesté par les rares avirons en bois conservés datant du XVIIe siècle) et posséder nécessairement des poignées, faute de pouvoir être attrapé directement à pleine main. De plus, la déclivité de l'aviron supposait une déclivité égale du banc supérieur, repoussant vers le haut le pont du navire, le rendant hautement instable faute de lest dans les œuvres vives, et surtout, un écartement très important du premier rameur face à l'apostis et donc un débord de nage largement supérieur, allant jusqu'à presque doubler la largeur du navire par rapport à sa ligne de flottaison, rajoutant encore des difficultés à le stabiliser en roulis...
Rien ne s'opposant à ce que des rameurs soient debout, les derniers à l'extrémité de la rame effectuant une véritable marche avec retour en plus de leurs efforts de traction/pulsion, s'appuyant de tout leur poids sur les rames. Cela induisait des passerelles intérieures ou des ponts complets, ce qui était difficile avec des rangs décalés de faible hauteur. Quoiqu'il en soit, la construction, la manoeuvre et l'apprentissage de la nage devait être particulièrement ardus.
Une "20" Lagide. Cette flotte en aligna un unique exemplaire, pourvu de trois rangs de rames. Elle se montra décevante en face des "30" construites ensuite en deux exemplaires.
Il est très probable en effet que les rameurs dans les "hyper-galères" (plus de cinq rameurs par aviron) étaient debout, de façon à ce que les derniers rameurs, ce qui se trouvaient le plus éloignés du point de levier de rame, effectuent un déplacement sur trois ou quatre pas au moins (amplitude de deux mètres), cette distance décroissant jusqu'au rameur le plus proche de l'apostis. Il semble peu concevable dans ces conditions qu'il y ait eu des rameurs assis et d'autres debout sur la même rame. Enfin, le fait que les rameurs étaient debout et évoluaient dans la longueur pose le problème des ponts: Il faut imaginer pour une "40", quatre ponts complets superposés, ce qui semble porter le navire à des hauteurs colossales et du coup devient peu plausible. Par contre, en gardant une hauteur raisonnable, surtout pour la "40' qui devait posséder 4 rangs de rames chacun maniés par dix rameurs, les thranites fournissaient l'effort le plus grand du fait de la longueur de la rame comparée à la hauteur du navire; et d'autre part les rameurs se trouvaient décalés à hauteur de mi-corps, ce qui exclue autre chose qu'une chambre de nage unique pour tous les rameurs, immense espace rythmé par des traverses longitudinales, passerelles décalées pour les rameurs, les poutres transversales et verticales...
La structure interne de cette chambre devait être un véritable cauchemar pour tout architecte naval de l'époque (caprice de princes...). Le fait que ces rames étaient pourvues de poignées semble évident tant sa largeur était considérable (on parle d'avirons de quatre tonnes et plus de dix-sept mètres pour la tekkerakonteros). L'autre difficulté de la rame était sa grande finesse comparée à sa longueur (problèmes de solidité à la torsion, et de souplesse à la fois). S'agissait t'il de jeunes pins choisis exprès? Ou d'une autre espèce dont on joignait plusieurs sections décroissantes, taillées en biseau et entourées par un anneau de métal ou de cordages?... Le mystère demanderait une reconstitution - au moins d'une bordée...
On sait que les Lagides disposaient d'une flotte de proportions considérable ( l'équivalent de la Royal Navy en 1914 ou de l'US Navy aujourd'hui ), pas seulement numériquement mais aussi qualitativement avec une forte proportion de "7", "6", "9", et des "11", "12", "13" dits "de rupture"... ( Voir flotte Lagide ). Les Macédoniens n'étaient pas en reste, avec notamment la rivalité navale exacerbée entre Ptolémée II et Antigone Gonatas ( Voir flotte Macédonienne ) qui accoucha de fabuleux pachydermes. Certaines cités indépendantes en construisaient également. Syracuse, certainement, puisqu'elle vendit à Ptolémée son "Alexandris", navire marchand aux proportions bibliques, mais dérivé simplement des Corbites construites pour convoyer le blé de Sicile vers l'Italie. Rhodes, plébiscitée par tous par son expérience comme pour son esprit visionnaire, s'en tenait à des navires raisonnables, mais elle posséda sans doute au moins une "dékère". Pergame, qui combattit à la fois Macédoniens et Séleucides au gré des alliances, possédait également une flotte considérable, et au moins une dizaine de "navires cataphractes". Chaque souverain de l'époque prouvait la puissance de sa nation sur les mers en arborant ces géants de bois.
Maquette des restes du "Nemi I". Navire nettement plus marin que le Palais flottant Nemi II. Très large, il possédait trois quilles, et sa hauteur, déduite de la proue et de la dérive, était assez faible. Le Nemi I mesurait 70 m sur 20 m et était propulsé à la rame, mais dans une disposition qui reste mystérieuse. (http://nemiship.multiservers.com/archeo/)
Pour finir, cet épisode maritime tricentenaire à trouvé son épilogue lors de la bataille d'Actium, consacrant la fin de la dernière grande flotte Hellène en même temps que le temps de ces "hyper-galères", surclassées par une technique nouvelle, judicieusement comparée postérieurement à la confrontation des cuirassés avec les torpilleurs à la fin du XIXe siècle. Mais le mot de la fin revient certainement aux nostalgies Romaines tardives, celles notamment de Caligula, l'empereur qui se fit construire deux navires géants consacrés à Diane pour naviguer sur le lac Nemi. Ils furent découverts l'un et l'autre en 1930 en vidant partiellement le lac, confirmant les écrits de Suétone. Le premier, appelé Nemi I, fut la réplique supposée exacte, car d'après les descriptions faites par Pausanias, l'admirant au sanctuaire des Taureaux à Délos de l'Isthmia qui y aurait reposé des siècles durant. Le Nemi II était un revanche un simple palais flottant presque aussi large que long, et aucunement marin, tout juste bon à devenir le point de mire de naumachies à grande échelle. Les deux navires, extraits en bon état ( vases bactéricides ), restaurés et conservés dans des hangars, furent malheureusement brûlés par des soldats Allemands -par les SS, par pure vengeance de l'armistice Italien- durant leur retraite début 1944. Cette perte est aussi celle d'une technique de construction qui aurait pu nous en apprendre bien plus sur ces fameuses galères géantes, un vide que ne comble pas le "modeste" navire de Marsala.
Pour finir, cet épisode maritime tricentenaire à trouvé son épilogue lors de la bataille d'Actium, consacrant la fin de la dernière grande flotte Hellène en même temps que le temps de ces "hyper-galères", surclassées par une technique nouvelle, judicieusement comparée postérieurement à la confrontation des cuirassés avec les torpilleurs à la fin du XIXe siècle. Mais le mot de la fin revient certainement aux nostalgies Romaines tardives, celles notamment de Caligula, l'empereur qui se fit construire deux navires géants consacrés à Diane pour naviguer sur le lac Nemi. Ils furent découverts l'un et l'autre en 1930 en vidant partiellement le lac, confirmant les écrits de Suétone. Le premier, appelé Nemi I, fut la réplique supposée exacte, car d'après les descriptions faites par Pausanias, l'admirant au sanctuaire des Taureaux à Délos de l'Isthmia qui y aurait reposé des siècles durant. Le Nemi II était un revanche un simple palais flottant presque aussi large que long, et aucunement marin, tout juste bon à devenir le point de mire de naumachies à grande échelle. Les deux navires, extraits en bon état ( vases bactéricides ), restaurés et conservés dans des hangars, furent malheureusement brûlés par des soldats Allemands -par les SS, par pure vengeance de l'armistice Italien- durant leur retraite début 1944. Cette perte est aussi celle d'une technique de construction qui aurait pu nous en apprendre bien plus sur ces fameuses galères géantes, un vide que ne comble pas le "modeste" navire de Marsala.