Mers-el-Kébir (3 juillet 1940) La rade de Mers-El Kébir sous le feu Britannique. ( Image Wikipedia ). La défaite éclair de la France allait plonger les rédactions de presse du monde entier dans la consternation: Personne ne s'attendait à autre chose qu'une "redite" de la grande guerre, la France devant faire "tampon" à l'Allemagne, notamment vis-à vis de la Grande-Bretagne. Lorsque cette dernière tomba et que l'armistice fut demandée par le maréchal Pétain et un certain nombre de membres de la IVe république, l'Angleterre se trouvait livrée à elle-même face à l'axe aussi bien en atlantique, mer du nord que dans l'océan indien et en méditerranée. Dans ce dernier secteur, ses forces regroupées principalement à Gibraltar étaient inférieures à la regia Marina, car la marine Française était jugée autrefois suffisante localemement pour y faire face. Mais dès lors que l'armistice était demandé, et ce malgré l'opposition d'officiers dont de Gaulle, du président Paul Raynaud, et d'autres membres de la IVe république, malgré l'éphémère projet de continuer la lutte au sein du "réduit breton", puis au sein de l'empire, ou de l'alliance nationale Franco-Britannique, la France livrait matériel et prisonniers à l'Allemagne. Après ces deux mois de campagne qui avaient coûté cher aux forces Françaises, la marine était absolument intacte, formidable instrument aux mains du futur gouvernement de Vichy. Les relations se tendirent entre les signataires dont Pétain et Churchill très tôt, et allaient trouver une rupture définitive qui allait faire basculer la France dans une neutralité collaborationniste, étant passée très prés de rejoindre ouvertement l'axe à l'ssue de ce qui va suivre. Pour diverses raisons, Churchill voyait le nouveau gouvernement Français d'un oeil méfiant, et encore plus le respect futur des conditions d'armistice par Hitler. Les clauses faisaient valoir un désarmement de la flotte sous contrôle Allemand et Italien. Son cauchemar fut de craindre la mainmise de l'axe sur la flotte. Ceci aurait eu des conséquences dramatiques pour l'équilibre des forces sur un théâtre d'opération vital pour l'Angleterre: La méditerranée. Le gros de la flotte y résidait en effet, outre des bâtiments stationnés à Alexandrie, les autres étaient au mouillage dans les bases de Dakar, donnant sur l'atlantique, Toulon, et Mers-el-Kébir en Algérie, près d'Oran. Les bâtiments Français stationnés à Brest avaient appareillé en urgence vers la grande-bretagne ou des îles Françaises des caraïbes ( Martinique ), d'autres étaient présents dans la base de Saigon en indochine. Si d'une manière ou d'une autre, comme le scénario qui faillit se réaliser en novembre 1943, l'axe mettait la main sur la flotte de Toulon et celles stationnées allieurs, le déséquilibre en sa faveur en méditerranée aurait sans aucun doute chassé la Royal navy de ce secteur, avec pour conséquence probable la prise de l'Egypte ( sans parler de Malte et Gibraltar ). Empêchant tout renfort et fermant la route des indes et des colonies de l'est à la Grande-Bretagne, ainsi qu'à de précieuses ressources en carburant et matières premières. Devant ce scénario catastrophe, et après avoir épuisé ses forces terrestres en france et à s'apprêter à livrer un combat désespéré contre la Luftwaffe avec une RAF affaiblie, tous les espoirs reposaient sur la Royal navy. Cette dernière était en grande partie mobilisée contre une sortie de la flotte Allemande en mer du nord, de fait, l'escadre de la méditerranée devait se débrouiller seule. Après avoir demandé à la France de livrer sa flotte à l'amirauté Britannique, le voila devant un dilemne d'importance. Dès le 25 juin, il se voit confronté à un péril politique interne: Une frange de la population éprouvant des sympathies pour le régime nazi, y compris quelques lords, une vaste frange pacifiste, comme en France, lui donnent l'obligation de mobiliser la population par un acte fort, le témoignage d'une réssolution implacable à poursuivre la guerre quelqu'en soit le prix. Churchill écrira plus tard dans ses mémoires que au sein des sombres perspectives auxquelles il était confronté lui revint en mémoire la phrase des révolutionnaires Français: "Les rois coalisés d'Europe nous menacent, jetons-leur en défi une tête de Roi...". Il prépara l'opération "catapult" dans ces grandes lignes à ce moment. Il devra faire face encore à l'opposition de beaucoup des membres du cabinet de guerre, à qui il arracha de justesse l'approbation, et suscita également une viivre répugnance au sein de l'amirauté Britannique: Quelques mois auparavant en effet la Flotte Française et britannique étaient au coude à coude à Dunkerque, en Norvège, en Atlantique sud à pourchasser le Graf Spee... Le 13 juin, Churchill et Dudley Pound envoient un dernier message au gouvernement Français, toujours pour demander le passage du côté Britannique de la flotte Française, en garantissant son indépendance d'action. Churchill est en effet dubitatif en regard de l'article 8 de la convention de paix, qui indique que les navires Français doivent êtres désarmés sous le contrôle de l'Allemagne et de l'Italie: Le terme "contrôle" à en Anglais une saveur beaucoup plus autoritaire, équivalent à une prise de possession. Sa méfiance vis-à-vis de Darlan ne va que s'aggraver suite à sa participation au gouvernement de Pétain. Le 23 juin, il y avait de facto une quasi-rupture des relations diplomatiques, seule subsistant la mission navale du contre-amiral Olden'hal, et encore ce dernier n'était pas pleinement informé par le gouvernemement de Bordeaux. Les fins de non-recevoir de Darlan et sa méfiance envers la parole donnée par Hitler conduisit Churchill à accélérer l'opération Catapult. Le 27 juin, le plan définitif est approuvé et connaît un début d'éxécution: L'amiral Godfroy dont les navires sont à Alexandrie ( le canal de Suez est également vital pour la France du fait de ses possession d'extrême-Orient ) reçoit de l'amirauté l'ordre de rallier Beyrouth. Il en informe son homologue Britannique A. Cunningham qui l'informe à son tour avoir reçu pour instruction de ne pas le laisser quitter le port. Le 29, la France est officiellement autorisée à commencer le désarmement de ses navires, et les préparatifs commencent mollement: Le nouveau gouvernement souhaite garder le potentiel de la flotte intact, alors que par ailleurs, l'amiral Darlan à fait la promesse de saborder ses bâtiments en cas de menace de capture par l'axe. Le 1er juillet l'amiral Sommerville qui commande la flotte de Gibraltar reçoit l'ordre d'appareiller en direction de Mers-El-Kébir ou se trouvent les effectifs les plus importants de la marine Française en dehors de Toulon: 4 cuirassés en effet y sont mouillés.
Sommerville renvoya un message de demande de confirmation tant il répugnait à éxécuter la mission qu'on lui avait confié. Le 3 juillet peu avant l'aube, les troupes Britanniques s'emparent sans ménagement des bâtiments Français réfugiés à Portsmouth, Plymouth, Sheerness et Falmouth. Il y aura un mort et quelques blessés de chaque côté. Du côté d'Alexandrie, navires Français et Britanniques se regardent en chiens de faïence: Les canons Britanniques sont pointés sur les vaisseaux Français ( Le cuirassé Lorraine, trois croiseurs, trois torpilleurs et un sous-marin ), et ces derniers ont leurs tubes lance-torpilles prêts à faire feu. A 8 heures Cunningham doit transmettre à Godfroy l'ultimatum conssitant à remettre les bâtiments Français à la Royal Navy, par une passation d'équipage ou à la faire désarmer sous contrôle Britannique. Les négociations continueront tout le jour. On cherche à temporiser des deux côtés. En revanche, à 6 heures, l'escadre de Gibraltar, la "force H" de Sommerville arrive à portée de canon de la rade de Mers-el-Kébir. Il s'agit d'abord du destroyer Foxhound, en éclaireur, rapidement suivi par le reste de la flotte. Cette dernière comprend le croiseur de bataille Hood, les cuirassés Resolution et Valiant, le porte-avions Ark Royal, 2 croiseurs et 12 destroyers. Les forces Françaises présentes comprennent les cuirassés Dunkerque et Strasbourg, bâtiments récents et rapides, les cuirassés Provence et Bretagne plus anciens, le transport d'aviation Cdt Teste, les destroyers Kersaint, Tigre, Terrible, Lynx, Mogador et Volta, toutes de puissantes unités, plus 15 torpilleurs et 4 submersibles, sans compter les effectifs aériens. Ces effectifs sont sous le commandement du vice-amiral Gensoul, un Anglophile, qui eut le privilège d'avoir sous ses ordres le Hood lors d'une chasse conjointe de raiders Allemands en 1939. De leur côté les Britanniques ont fait embarquer à bord du Foxhound le capitaine de vaisseau Holland, un francophile qui fut attaché naval à Paris et officier de liaison auprés de l'amirauté Française en 1939. Tout semble donc réuni à priori pour arriver à un accord. A 8 heures, après avoir prévenu les Français d'une communication très importante, un message en morse du Hood indique "Nous espérons que nos propositions seront acceptables et que nous vous trouverons à nos côtés". Puis à 8h30, Gensoul reçoit la mise en demeure Britannique, un texte rédigé tel un ultimatum: Il laisse trois possibilité à Gensoul: Se joindre à la flotte Britannique, appareiller vers la Grande-Bretagne pour un désarmement sous contrôle Britannique, ou faire route vers les antilles ou les USA dont la neutralité permettait de ne pas violer l'accord d'armistice. Mais l'esprit de la missive semblait s'y opposer. Les deux premières solutions impliquant de violer la convention d'armistice, Gensoul se voit obligé de refuser. Par ailleurs, les vigies de Mers-el-Kébir voient parfaitement les préparatifs de la Force H et les canons braqués sur la rade. Un avion à même décollé pour observer celle-ci et préparer les réglages d'artillerie. Gensoul à donné l'ordre de réarmer au plus vite les batteries côtières et de préparer les bâtiments à un branlebas. Il envoie un message à l'amirauté, repliée à Nerac, dans ces termes: 'Force Anglaise comprenant 3 cuirassés, 1 porte-avions, croiseurs et torpilleurs devant Oran. Ultimtum envoyé: Coulez vos vaisseaux dans un délai de 6 heures ou nous vous y contraindront par la force". La réponse de l'amirauté est sans ambage: "Bâtiments Français répondront à la force par la force". De fait, la réponse que donne Gensoul est que d'une part les assurances données par l'amiral Darlan concernant un sabordage de la flotte en cas de tentative de mainmise de l'axe restaient entières, mais que d'autre part les bâtiments Français se défendront en cas d'attaque, soulignant que la communication Anglaise était considéré comme un ultimatum. Il refuse de recevoir Holland en personne, et c'est son aide de camp qui lui fait part des inquiétudes en cas de désarmement sous contrôle de l'axe: Un sabordage serait-il possible?. Par ailleurs, par l'intermédiaire de l'aide de camp de Gensoul, dêpéché sur le Foxhound, il laisse entendre qu'un désarmement sur place avec la présence de la Royla Navy restait possible. Mais ces arguments ne semblèrent pas fléchir Gensoul, et rien ne semblait plus pouvoir empêcher la confrontation des armes. Vers midi, des Sworfish de l'Ark Royal mouillèrent des mines magnétiques devant la sortie de la rade, afin de contredire les possibilités de la flotte de pouvoir cingler vers les antilles ou les USA. Vers 12h30 cependant, l'amiral Somerville répugnant encore à faire feu offre une dernière conciliation et repousse de son propre chef l'ultimatum à 14h30. Les aides de camp des deux bords ont réussi à faire accepter à Gensoul de rencontrer le commandant Holland. On peut alors recommencer à croire au miracle. Gensoul pense qu'un désarmement sur place peut constituer une base d'accord. Par ailleurs il souhaite gagner du temps pour accélérer ses préparatifs de combat et d'appareillage. A 14h30, Gensoul envoie un massage indiquant qu'il accepte de rencontrer Holland. De fait, Sommerville se voit obligé de proroger de nouveau l'ultimatum. A 15h15 la rencontre à lieu à bord du Dunkerque: Elle est encourageante: Gensoul remet à Holland le texte reçu de Darlan, l'instruction spécifiant le sabordage de la flotte en cas de menace de capture, et par ailleurs accepte d'entamer un désarmement in situ de ses bâtiments, mais sans la menace des canons de la Royal navy, et un appareillage immédiat en cas de menace est prévu vers les Antilles ou les USA. Cependant alors même que Holland, plein d'espoir, s'apprête à en rendre compte à Somerville, ce dernier vient de recevoir de Londres le message suivant: "Réglez rapidement les choses, sinon vous aurez affaire à des renforts". En effet, L'amiral Le Luc, à Nérac, à la lecture du message de Darlan, à fait appareiller les bâtiments stationnés à Toulon et Alger, en donnant instruction d'activer le branlebas et se préparer au combat. Il en informa ensuite Darlan, et le message fut intercepté par les Britanniques. Une nouvelle communication par morse est alors donnée depuis le Hood à l'amiral Gensoul, indiquant le report à 16h30 de l'ultimatum, dernier délai. Comme la délégation Britannique ne quitte le Dunkerque qu'à 16h25, la vedette qui emporte la contre-proposition de Gensoul est en route vers le Hood. Mais elle n'est pas encore là lorsque l'amiral décide d'en finir et ordonne de faire feu à 16h53. Le teme de "bataille" qui fut employé plus tard par la presse, y compris Américaine et qui scandalisa l'ensemble des Français, y compris De Gaulle, fut en réalité une véritable éxécution sommaire: Les navires Français étaient amarrés perpendiculairement à la rade, tournés vers l'intérieur. De fait, les deux "croiseurs de bataille" Dunkerque et Strasbourg présentaient leur artillerie vers la terre. de la même façon, les batteries étaient pour la plupart tournées vers l'intérieur. Certaines répliquèrent et encadrèrent le Foxhound. Depuis la rade, le spectacle était dantesque ( voir photo ci-dessus ): Le Hood, le Valiant et le Resolution étaient équipés de 8 pièces de 381 mm chacun, ce qui représentait un total de 24 pièces. Chaque salve soulevait d'immenses gerbes d'eau de presque cent mètres qui retombaient en grondant. Soudain, alors que ces dernières encadraient les cuirassés Français, ce fut l'apocalypse: Le Dunkerque fut frappé sur sa plage avant: Une tourelle sauta, le générateur électroqie principal et le système hydraulique furent en avarie. La coque percée, il prenait l'eau de toutes part et son commandant, pour éviter qu'il ne sombre, le fit aller droit devant à pleine puissance, jusqu'à ce qu'il soit drossé contre la plage. En quatre minutes, le grand navire de guerre était une épave fumante dont la poupe était noyée sous des mètres d'eau tandis que la poupe se dressait au-dessus de la grêve. Mais le pire était à venir: Le Bretagne, touché le premier de 13 000 mètres se souleva soudain comme par la main d'un titan par le milieu: Ses soutes avaient étées atteintes. Un immense colonne de flammes siuvi d'un énorme champignon remplaça bientôt l'espace de cette soute. La coque, rompue en deux se délita et ce qui restait du navire chavira et sombra si rapidement qu'il entraîna avec lui 1000 hommes. Le provence, qui avait assez de vapeur, fit machines avant, puis se dégagea de la rade pour que sa volée puisse passer au-dessus et ouvrit le feu. A sa salve contre le Hood répondit un coup au bur terrible qui fit sauter sa tourelle de 340 mm et brûler sa soute à munitions qu'il fallut éteindre d'urgence faute de voir le navire exploser. La coque était rompue en mains endroits et le compartiment des machines faisait eau de toutes part. Il alla également se jeter sur le fond de la rade pour éviter de couler. Le Mogador, le plus grand destroyer du monde à l'époque, vit sa poupe déchiquetée par un impact de grosse pièce au moment ou avec d'autres destroyers, tentait de sortir du port. Tout l'avant du navire s'embrasa et il fut remorqué jusqu'au fond de la rade. D'autres bâtiments, des torpilleurs principalement, étaient également frappés à mort. Seul le Strasbourg, dont les soutiers avaient fait l'impossible, était à présent capable de prendre la mer à toute force de machines. Son commandant, l'avait habilement manoeuvré derrière le brasier du Bretagne pour le soustraire au regard des télémétristes Britanniques. Miraculeusement, il passa entre les gerbes géantes et les épaves en feu, puis louvoya à la sortie entre les mines, à pleine vitesse, dans une manoeuvre de marin qui força l'admiration des Britanniques. Il parvint, avec quelques destroyers, à rejoindre Toulon et Somerville, qui fut critiqué à cet égard, renonça à le suivre. Le cuirassé Dunkerque, l'un des plus puissants bâtiments du monde à l'époque. Lorsque les canons se turent - on ne chercha pas l'acharnement, le geste était déjà assez cruel - la rade de mers-el-Kébir donnait l'affreux spectacle d'un champ d'épaves brûlant dans d'immenses fumées noires. Au milieu des débris, surnageaient de minuscules corps blancs, les morts et les vivants qui regagnaient la plage à la nage. Ce qui fut le fer de lance de la flotte de l'atlantique n'était plus. Restaient le Richelieu à Dakar et le Jean Bart, inachevé à Casablanca. Comme le dira De Gaulle, qui envisagea un temps de s'exiler au Canada, "c'était dans nos espoirs, un formidable coup de hache"... Les conséquences de l'intransigeance du "vieux lion", d'un manque de communication et de suffisance de la part d'officiers Français, dont Gensoul, qui refusa de s'entetenir avec Holland et son aide de camp, préférant Somerville du même grade, conduisit à ce drame considérable. Alors que la première conséquene fut de rompre les restes de relations diplomatiques - déjà bien ténus - entre la France et le Royaume-uni, il conduisit une grande partie des Français à s'insurger contre l'allié de la veille. La propagande s'en donna à coeur joie, ce qui fit les affaires de Goebbels et jeta presque le gouvernement d'une collaboration à une franche alliance de fait. Par la suite, à de nombreuse reprises, les Français restés fidèles à Vichy montrèrent une résistance farouche. La seule réplique immédiate fut une attaque d'hydravions bombardiers sur Gibraltar, menée pour la forme et sans conséquences; Mais par la suite devant Dakar, le souvenir de mers-el-Kébir allait conduire les Français de Vichy et ceux de la France libre à un affrontement fratricide qui n'était que le prélude d'une série...
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