SNA classe "Oscar" I et II (1978-1986)


 

Les SNA de la classe "Oscar I" (projet 949 Granit) et "Oscar II" ( projet 949A Bazalt) ( projet "Antey" selon d'autres sources ) sont doublement célèbres: D'abord par le fait qu'ils sont ( et sans doute seront pour longtemps ) les plus grands sous-marins d'attaque jamais construits ( 14 600 tonnes, le poids d'un petit porte-avions ), mais aussi par la tragédie très médiatisée ( et controversée ) du dixième et dernier de la série, le Koursk.

Tout commence par l'étude par Rubin à Severodvinsk dans les années 70 d'un remplacement pour les SNLEA  ( Sous-marins nucléaires d'attaque lanceurs d'engins, ou SSGN en Anglais ) de la classe Echo II. Le pivot de ces recherches est le dernier missile antinavire à tête nucléaire tactique en développement, le SS-N-19 Chelomey Granit supersonique ( mach 1,6 ), lancé sans faire surface, contrairement à ceux des Echo. Ces missiles devaient en outre être guidés par satellite, mais ce système ne fut pas adopté et ce rôle revint aux radars de l'Oscar. Les silos, inspirés de ceux testé sur l'unique "Papa", étaient par paires, inclinés à 40° entre la coque interne et la coque externe. Ce système à le défaut d'une habitabilité en retrait, mais l'avantage d'une meilleure isolation phonique et d'une survivabilité plus grande en cas d'impact d'une torpille conventionnelle. Les Oscar sont lents à plonger et peu manoeuvrants mais rapides en plongée ( 30 noeuds ). Leur arsenal de 24 missiles de croisière antinavires, d'une portée de 550 Km, avec une tête nucléaire de 100 kt. ou classique de 750 Kgs. en font des SNA sans équivalents dans le monde, conçus toujours en réponse aux Etats-Unis, comme des "tueurs de porte-avions". Les Oscar II ont été allongés de 10 mètres, dotés d'une nouvelle électronique, et d'une meilleure signature acoustique, notamment grâce à des hélices à 7 pales, entraînant moins de cavitation et les rendant plus manoeuvrants. Ils disposent aussi d'un panachage de torpilles de 533 et de 610 mm pour lancer des missiles encapsulés SS-N-15 Starfish et SS-N-16 Stallion ( 45 et 100 km de portée ).
Enfin, les Oscar ont en commun avec les "Typhoon" deux petites capsules ( pour tout l'équipage ) d'évacuation en urgence située derrière le kiosque.

Les 2 Oscar I, K208 et le K523, furent lancés en 1980 et 1982. Les 11 ( ou 12? ) Oscar II, en 1986, 87, 88, 90, et 92 et 97 pour le dernier. Il y en avait donc 4 en service dans la marine soviétique en 1990. Aujourd'hui ces unités sont le fer de lance des SNA lance-missiles russes et sont toutes ( sauf le Koursk, disparu et les deux Oscar I, mis en réserve en 1996 ) en service en 2005. Ils ont tous étés renommés. ( Les sources diffèrent sur les dénominations, attribuées de façon obscure par le commandement Soviétique, mais s'accordent la construction de 10 unités au moins de la classe Oscar II . ). Les attributions par flottes sont également variables selon les sources, mais les Oscar sont en majorité basés dans le Pacifique et les autres dans la flotte du Nord. Actuellement, on fait état de 7 SNA dans la flotte du Pacifique et 4 pour l'Arctique.

Les Oscar I  ( K 252 et K206, Arkhangelsk et Murmansk selon certaines sources ) auraient étés démolis par Sevmash en janvier 2004, démantèlement financé par un fonds Européen pour la réduction des menaces nucléaires. L'entretien des Oscar II n'étant pas reluisant, le 26 janvier 1998, l'une de ces unités, pourtant pratiquement neuve, subit un grave accident interne dû à une fuite de nitrogène liquide et d'ammoniac lors d'un test de routine. Il y eut 5 intoxiqués et un mort. Il s'agirait du K-512 ( Tomsk ), accepté en service en 1997 malgré de nombreux problème récurrents de ce type aux essais. En septembre 1994, un autre se prit dans les filets du chalutier Espagnol Jose maria Pastor. Il y resta bloqué une heure avant de s'en échapper... L'histoire ne dit rien du remboursement des dégâts causé par ses 16 000 tonnes dans ledit filet. Une vieille tradition Russe consistant à se prendre pour une ablette afin de mieux espionner les méthodes de pêche capitalistes...

Un Sous-marin du type Oscar I. Image Wiki sous licence Creative Commons

La tragédie du Koursk

Mais l'anecdote la plus tristement célèbre concernant ces unités fut probablement celle survenue au "Koursk", K-141, qui coula à 100 milles nautiques de Mourmansk dans l'Arctique en mer de Barentz. Le 12 août 2000, il participait à un de ces exercices annuels de grande ampleur auxquels se livrent chaque flotte, comme ici celle de l'Arctique. Enfonçons le clou: L'histoire ne dit pas officiellement si un ou des SNA Américains y participaient secrètement comme jadis pour s'informer des méthodes tactiques Russes... Mais factuellement, le Koursk coula très rapidement ( sans envoyer de balise de détresse ), pour des raisons qui sont restées obscures; Il n'embarquait pas d'armes nucléaires et ses réacteurs ne présentaient pas de risque autre que celui d'un incendie à priori. L'une des hypothèses officielles adoptées qui est de mise actuellement chez les Russes, concerne un cas de collision fatale avec un "objet sous-marin particulièrement massif", d'après des résultats d'expertise, dont un morceau de coque retrouvée non loin du lieu du naufrage et non identifié comme faisant partie du Koursk...

D'autre part, le commandement soviétique s'est contredit dans une suite d'hypothèses sujettes à caution. Le président Vladimir Poutine, retranché dans un mutisme de plusieurs jours s'est d'ailleurs opposé à toute ingérence immédiate en refusant l'aide des occidentaux alors qu'il y avait encore un espoir de sauver les sous-mariniers encore vivants restés à bord. pendant une semaine, aucune aide ne put être apportée aux survivants. De plus, le croiseur Pierre le Grand ( ex-Kirov ), au lieu de cingler vers le lieu du drame s'en écarta à toute vapeur... Le 14, soit deux jours après la catastrophe, une dépêche plus tard démentie notait que le sous-marin de sauvetage Kolokol avait ravitaillé en air et en énergie le Koursk et qu'une communication radio aurait été établie avec son commandant Gennadi Lyachin. Les rapports étaient peu optimistes alors sur les chances de sauver au moins une partie de l'équipage: Les conditions météo s'étaient dégradées, le courant trop fort, la visibilité nulle, et le Koursk étant immergé seulement à 170 mètres de profondeur. Leur meilleure chance aurait été les deux "India" spécialisés dans ce rôle, mais ils furent rayés des listes en 1995 pour faire des économies budgétaires. Lorsque l'équipe Norvégienne arriva sur les lieux et finalement débloqua le sas arrière, ce ne fut que pour constater que tout l'intérieur du sous-marin était submergé. Il y eut finalement 118 victimes...

L'une de ces hypothèses russes fait état d'une explosion d'une mine datant de la seconde guerre mondiale... Hypothèse peu crédible s'il en est vu la probabilité faible d'en rencontrer encore fonctionnelles après 60 ans, et surtout capable de provoquer de tels dégâts... Par ailleurs deux autres hypothèses persistantes et nettement plus crédibles, mais rejetée par le commandement Russe qui tente de sauvegarder la crédibilité de ses forces, font état de l'explosion d'une torpille, ou de l'impact d'un engin ASM lancé par le croiseur Pierre le Grand. En effet, des sismologues Norvégiens ont bien enregistrés un mini-séisme dans la zone du naufrage, deux secousses qui auraient pu être provoquées par l'explosion du moteur à peroxyde d'hydrogène d'une de ces torpilles, puis du stock entier, à deux minutes d'intervalle, de 1,5 et 3,5 sur l'échelle de Richter. Les pays de l'OTAN sont partisans de cette hypothèse, qui de surcroît arrange l'US Navy sur qui les soupçons pèsent encore, malgré ses dénégations. Mais elle pourrait bien se retourner contre eux. En effet le Koursk fut renfloué par les Hollandais ( Mammoet ) pour enquête d'août à octobre. On y mit en évidence l'énorme ouverture qui avait été provoquée par une explosion interne.

Le K-190 du type Oscar II (img wiki DP)

Selon la thèse sensationnaliste de Jean-Pierre Petit ( à prendre au second degré!!!, http://www.jp-petit.com/Koursk/Koursk1.htm ), le koursk aurait été "tamponné" et torpillé intentionnellement par un SNA de la classe Los Angeles, le USS Toledo. Ce dernier fut en effet reporté en réparations de sa proue en Norvège, toujours ce mois d'août. Il est dit aussi que le Koursk aurait subi des modifications par l'ajout d'un nouveau tube destiné aux lancement de torpilles de nouvelle génération, thermodynamique et capable de filer à 200 noeuds et plus... Que l'une d'elles aurait explosé et que pour protéger ce secret, il y ait eu le black-out et le refus de toute ingérence, jusqu'à ce que les témoins du drame disparaissent. Il est aussi question d'un torpillage délibéré du Koursk par ce SNA mystère, ce dernier aurait-il répliqué avec bien peu de sang-froid à l'ouverture des tubes du Koursk pour essai? Il est question aussi d'un torpillage délibéré pour éviter la vente de cette torpille aux Chinois... On parle enfin d'une mutinerie ( un officier repêché avec une balle dans la tête ), et de trois noyés étranges, un général Chinois et deux clients arabes... L'hypothèse de Jean-Michel Carré ( film diffusé sur Fr3 en 2003 ), sur lequel se base l'article de Petit, reste la plus romanesque entre toutes: Le Koursk devait faire la démonstration de ses nouvelles torpilles spéciales à très haute vitesse à des observateurs étrangers ( et clients pour la marine Russe qui en à grandement besoin ), et aurait été abordé délibérément par non pas un mais deux SNA Américains, et torpillé "coque contre coque". La confusion qui aurait suivi aurait permis d'étouffer conjointement l'affaire à la Maison-Blanche et au Kremlin. Cet incident aurait été aussi grave, sinon plus, que l'affaire des fusées de Cuba en 1962... Enfin, il faut que les capsules de sauvetage et les deux issues de secours eussent été bloquées au même moment, ce qui reste mystérieux. On ne sait toujours pas du reste quelle portion de l'équipage avait pu survivre suite à ces deux explosions, bien que les hommes de l'équipe technique des réacteurs se soient réfugiés dans le seul compartiment étanche de l'arrière...

Il y a également une autre hypothèse qui fait état d'une erreur de tir du Pierre-le-Grand. C'est ce dernier qui était le plus proche du Koursk et ce peut-il que, conformément aux exercices navals, il ait tiré un missile ASM devenu incontrôlable? Le Koursk était-il délibérément visé et devait-il y opposer ses équipement de contre-mesure ou la solidité de sa double-coque? Cela paraît plus que douteux qu'un tel risque soit pris avec un submersible moderne et aussi coûteux ( ... ). Mais le Pierre le Grand ignorait peut-être la présence du Koursk, censé le "surprendre"... Le Pierre le Grand effectuait donc des exercices de tir réels tout comme le Koursk. On sait maintenant que le Koursk se trouvait en immersion périscopique ( à 18 mètres de la surface ) lorsque la première explosion survint dans le compartiment des torpilles. Celle-ci, déjà forte, -moins d'une tonne de TNT- réussit à provoquer une grande brèche dans la double coque, suffisante pour que les premiers compartiments se remplissent et entraînent la "chute" du sous-marin vers le fond, ce qui expliquerait le second impact enregistré, beaucoup plus violent, résultant sans doute de l'explosion des torpilles chargées dans les tubes lorsque sa proue heurta le fond. C'est cette seconde explosion qui ouvrit tout l'avant du Koursk et acheva de le remplir en un temps record. Quant à l'origine de la première explosion... Il est possible aussi que le Koursk ait été frappé par sa propre torpille à haute vitesse. Une chose est certaine: Ces exercices du Koursk étaient très importants et pas moins de 11 officiers observateurs se trouvaient sur la liste des personnes embarquées le jour du drame.

Un témoignage recueilli dans la poche de l'uniforme du lieutenant de vaisseau Dmitri Kolesnikov, l'un des noyés: "13.15. Les membres d'équipage des compartiments 6, 7 et 8 sont passés dans le compartiment 9. Nous sommes ici 23 personnes. Nous avons pris cette décision à la suite de l'accident. Personne ne peut sortir du sous-marin", et plus loin  : "13, 5... j'écris dans le noir...".

( v. par exemple l'article du monde diplomatique http://www.monde-diplomatique.fr/2005/01/RADVANYI/11870 ).
Voir aussi: http://www.janes.com/defence/naval_forces/news/jfs/jfs000814_2_n.shtml
http://www.net4war.com/e-revue/dossiers/marine/koursk/koursk.html

Caractéristiques ( Oscar I ):

 Déplacement & Dimensions

 12 500t, 14 600t surf/plong. 143 x 18,2 x 9 m

 Propulsion  2 RN, 2 turbines , 90 000 cv. et 30-33 Noeuds max.
 Equipage  130
 Armement  24 SS-N-19, 2 TLT 533, 4 TLT 650 mm ( proue 24 torpilles/miss. ).
 Capteurs  Antennes Rim Hat, sonar  ?.
 




Caractéristiques ( Oscar II ):

 Déplacement & Dimensions

 13 900t, 18 300t surf/plong. 154 x 18,2 x 9m

 Propulsion  1 RN, 2 turbines , 30 000 cv. et 30 Noeuds max.
 Equipage  136
 Armement  24 SS-N-19, 2 TLT 533, 4 TLT 650 mm ( proue 24 torpilles/miss. ).
 Capteurs  Antenne Rim Hat.