Tesseracontère Ptolémaïque (220 av.jc.)


Tesseracontere
La flotte des Ptolémées, de son origine Grecque, ou plutôt Macédonienne, avait les techniques de construction et le goût pour les grands navires, en y ajoutant le faste des Pharaons. Véritable monstre, cette galère palais, et en même temps bâtiment amiral de la flotte de Ptolémée Philopator, était une "40", comptant donc quarante hommes par bordée, avec 4000 rameurs selon les écritures, ce qui indique que chaque aviron long de 17 mètres pouvait être manié par 10 hommes, et que par conséquent, cette galère pouvait avoir quatre rangs de rames, ou bien trois avec seize, treize et dix rameurs, les avirons des rangs les plus hauts étant nettement plus longs, ce qui paraît du coup moins probable. Quoiqu'il en soit, ces avirons étaient si gros qu'ils ne pouvaient êtres saisis directement, mais par le truchement de "poignées" ménagées à cet effet. Les rameurs devaient êtres fort décalés et avoir un rôle à jouer différent selon sa distance de l'apostis, le point de levier de l'aviron.

Navire mystérieux mais dont l'existence est rapportée, on connaît mal ses dimensions, variant de 120 à 80 mètres, et entre 15 et 30 en largeur, et 50 avec éventuellement une double coque. Du fait de son imposant tirant d'eau, ce navire ne pouvait accoster dans aucun port, restant en pleine mer. Ou alors a contrario il est fort possible aussi qu'il ait été lancé, mais soit resté à quai tout comme les palais flottants de Caligula quelques siècles plus tard sur le Lac Nemi, son énormité le condamnant au contraire à ne pas franchir les limites de son bassin dédié. Précédé par le "20" de son père Ptolémée Philadelphe, et inspiré peut-être des "30" de la flotte, cette unité navale superfétatoire du dernier Ptolémée constituait le point d'orgue de la rivalité entre les Antigonides de Macédoine et l'Égypte Lagide.

Ce navire mythique pose sans doute la plus belle énigme aux archéologues, mais aussi aux ingénieurs. Le simple bon sens commande de se défier d'un tel gigantisme s'agissant d'une galère, les essais de la trière de Coates et Morrison dans les années 80 ayant prouvé que ce système fonctionne mais est déjà complexe avec seulement un rameur par aviron. Qu'en est-il de dix et plus?... Tout d'abord, 4000 rameurs, pour une bordée de 40, cela signifie fatalement, qu'il y avait nécessairement au moins quatre rangs de rames superposés, avec dix rameurs pour chacune. On imagine mal en effet des rames de plus de dix hommes. Ensuite, la superposition des rangs pose le problème de la longueur des rames: Les "contre-thalamites" (rang le plus bas) auraient dû fournir un effort bien moins important que les Thranites, du fait de la longueur croissante des avirons en allant vers le haut. Et dix rameurs c'est encore beaucoup: Cela pose en effet le problème de la position des rameurs internes par rapport au point de levier de la rame: Trop près, leur effort aurait été dérisoire ou au contraire trop important pour un résultat médiocre. Et éloigner les rameurs nécessite aussi bien d'écarter ce fameux point de levier de deux, trois mètres et plus (notamment par des avancées de la chambre de nage), et pose alors inévitablement celui de la longueur des rames, ce qui pour dix rameurs, nous amène à bien plus de 17 mètres s'agissant des thranites...

Tesseracontere

Tesseracontere 3 view
Tesseracontere 3 view
On doute alors que 8 rameurs est déjà un maximum envisageable, et est plus compatible avec la longueur des avirons (17 mètres) telle que décrite par Casson, qui lui mentionne la nature particulière de cette galère, qui aurait eu une configuration catamaran: Deux coques de "20" jointes par une grande plate-forme, ce qui aurait donné 1000 rameurs répartis sur 50 rangs de rames en 8 thranites, 7 zygites et 5 thalamites, 2000 rameurs donc pour chaque coque, ce qui du coup paraît beaucoup plus crédible. Un tel navire aurait eu un tirant d'eau plus faible et donc une plus grande mobilité, une très bonne stabilité de même qu'un vaste espace disponible pour les armes de jet. De plus la "40" était réputée embarquer 2850 soldats. (Voir illustrations). Dans une telle configuration, les deux "30" de Ptolémée III auraient pu également être deux catamarans, réunion de deux "15". La flotte Lagide avait une grande expérience des unités au-dessus de la dékère (10), et possédait pas moins de quatorze "11", deux "12" et quatre "13". Voir aussi le passage de l'article (En anglais) de John Illsley (université de Southampton, section archéologie maritime, http://cma.soton.ac.uk/HistShip/shlect27.htm).